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L'AYURVDEA, LE PLUS ANCIEN SYSTEME THERAPEUTIQUE ENCORE PRATIQUE

Dernière mise à jour : 13 avr.

Arrivés en Occident dans les années 60, la méditation tout comme le yoga sont aujourd’hui reconnus, en France, pour leurs bienfaits sur la santé tant physique que mentale. Ils ont même fait leur entrée à l’hôpital et à l’Université de Médecine. Les ventes de cours et de produits qui leur sont dédiés ont même explosé pendant le premier confinement lié à la Covid-19 en 2020. Ces pratiques peuvent vous sembler relever du simple bien-être. Mais savez-vous que dernière se cache, en réalité, une médecine ancestrale bien plus ancienne que la Médecine Traditionnelle Chinoise qu’elle a inspirée ? : l’Ayurvéda.

Praticienne en thérapies complémentaires, ouverte aux thérapies ancestrales, il y a deux ans, je suis partie seule pendant 5 semaines dans les montagnes du Sud de l’Inde expérimenter un panchakarma[1] dans un ashram[2]. Depuis mon retour en France, je travaille avec Anil Abhimanyu Sharma, psychologue, spécialiste en ayurvéda, professeur de yoga ancestral et chef de cuisine indienne spécialiste des épices, le seul en Europe. Il est né et a grandi en Inde. Depuis plus de 35 ans qu’il vit en France, il transmet son savoir sur cette discipline, qu’est l’ayurvéda, à travers les différents cours et formations qu’il anime. Aujourd’hui, il a décidé de répondre à mes questions sur le plus ancien système thérapeutique au monde encore pratiqué.





 SPL : Depuis une dizaine d’année, l’Ayurvéda suscite un engouement important. Elle s’affiche de plus en plus dans les magazines, sur les gondoles des rayons cosmétiques des supermarchés, dans les centres de massages, dans les médias. Mais qu’est-ce-que l’Ayurvéda au juste ?

AAS : En Sanskrit « Ayur » veut dire vie et « véda » veut dire sciences ce qui signifie littéralement « sciences de la vie ». On part du présupposé qu’au moment de la fécondation de l’ovule par le spermatozoïde, la constitution de l’individu que l’on appelle « Prakriti » c’est-à-dire « Nature » est déterminée. Chaque être humain représente la première création du cosmos : THE BIG BANG. Ne retrouve-t-on pas d’ailleurs dans le corps humain des composantes chimiques des étoiles tels que carbone, oxygène, hydrogène, azote, calcium, phosphore, fer, zinc, fluor, etc. ?

C’est la raison pour laquelle chaque être humain est une entité séparée, un phénomène unique. La compréhension du caractère unique de chaque individu constitue l’étude de Prakriti. L’Ayurvéda offre une approche directe de cette étude. En Ayurvéda, l’homme est considéré comme un microcosme évoluant dans le macrocosme ce qui entraîne un phénomène de cause à effet : le dernier influençant directement le premier. En d’autres termes, l’infiniment petit, de l’être humain jusqu’à la plus infime des molécules qui le composent, est le reflet de l’infiniment grand, des planètes ou des galaxies dans le cosmos, et fonctionne selon les mêmes principes. Ainsi, l’environnement dans lequel évolue l’individu a une grande importance.


SPL : Qu’est-ce-que la « Vie » en Ayurvéda ?

AAS : La Vie c’est le souffle. Le souffle anime et crée. En Ayurvéda, on considère qu’il y a 3 niveaux de souffle : celui qu’on inspire, celui qu’on expire et celui qui reste en permanence dans le corps, c’est-à-dire l’air résiduel. Ainsi en Yoga et méditation on va travailler le souffle.

Dans son essence, l’Ayurvéda est constitué de 5 méthodes :

  • la respiration et la méditation,

  • le Yoga et les asanas (postures),

  • le régime alimentaire et la détoxification du corps qu’on travaille avec les épices,

  • les massages et les huiles qui s’adressent à la partie squelette et musculaire du corps,

  • les remèdes à base de plantes et leurs minéraux,

Ces méthodes simples, non agressives et accessibles à tous, constituent un art de vivre complet prenant en compte tous les aspects de l’être humain, notamment l’existence du corps physique dont la vraie nature est ici révélée.

En plusieurs milliers d'années, les grands principes de l'Ayurvéda n'ont pas changé mais cette thérapeutique a su s'adapter aux changements du monde grâce à ses deux spécificités : l'observation et la notion de transformation.


SPL : A quand remonte l’Ayurvéda ?

AAS : Ce sont les Rishis (Sages) qui ont établi les fondements de l'Ayurvéda, il y a plus de 10 000 ans. Ils ont appris en s’observant eux-mêmes, en étant attentifs aux modifications de leur propre corps. La transmission de ce savoir a d’abord été faite oralement et uniquement aux hommes érudits. L’Ayurvéda a influencé, entre autres médecines celles de la Chine et de l’Asie du Sud-Est, du Tibet, de la Perse, de l’Egypte, de la Grèce et de la Rome Antique.

Mais après 700 ans de paix, c'est la civilisation de l’Indus qui menace de s'effondrer et avec elle c'est l'Ayurvéda qui menace de disparaître. Il en aurait été sans doute ainsi sans l'intervention en l'an 300 avant notre ère, d’un médecin militaire du nom de Sushruta, élève d'un grand guérisseur. Il va consigner son savoir par écrit alors que jusque-là l'Ayurvéda était transmise oralement. L'homme rédige en Sanskrit, la langue des érudits indiens, sur des feuilles de palmier. Il note tout ce qu'il sait : remèdes par centaines et interventions médicales. Ainsi que des réflexions philosophiques : « Nul ne peut recouvrer la santé si son corps et son esprit ne sont pas en harmonie ».

Les feuilles de palmier gravées par Sushruta constituent le Sushruta Samhita, ouvrage de référence en Ayurvéda. Elles ont, depuis longtemps, disparu mais ces notes ont été régulièrement recopiées. Elles sont conservées actuellement au collège Ayurvéda de Trivandrum au Sud de l’Inde. Ces écrits sont encore enseignés de nos jours et les traitements de Sushruta appliqués par les médecins ayurvédiques.

Avec les différentes colonisations européennes et surtout Britanniques Victoriennes, l’Ayurvéda subit de nombreuses pressions parce qu’elle n’est pas accessible à la compréhension occidentale et est assimilée à des pratiques « magiques ».

En 1830, l’Ayurvéda est désavouée par les Anglais. Sa pratique étant interdite, elle tombe dans la clandestinité pendant plus d’un siècle.

Cependant grâce à l’indépendance en 1947, sous l’influence du Mahatma Gandhi, elle retrouve ses lettres de noblesse et constitue alors le principal système médical pratiqué en Inde jusqu’à l’arrivée de la médecine occidentale.

C’est vers 1960, qu’elle est importée en Europe par Maharishi Mahesh Yogi, gourou (guru = professeur) indien spécialisé dans la méditation transcendantale.

En 1973, le Gouvernement Indien reconnaît officiellement comme médecines traditionnelles l’Ayurvéda et le Yoga mais aussi la naturopathie et l’homéopathie entre autres.

En 1980, le Congrès National de l’Inde attribue à l’Ayurvéda le même statut que la médecine occidentale.

En 1982, l’Organisation Mondiale de la Santé reconnaît l’Ayurvéda comme médecine traditionnelle qu’elle qualifie ainsi : « La médecine traditionnelle est la somme des connaissances, compétences et pratiques qui reposent sur les théories, croyances et expériences propres à une culture et qui sont utilisées pour maintenir les êtres humains en bonne santé ainsi que pour prévenir, diagnostiquer, traiter et guérir des maladies physiques et mentales ».

En 2014, le premier ministre indien, Narendra Modi, crée le premier ministère dédié à l’Ayurvéda et au Yoga.Comprendre, les médecines traditionnelles indiennes, l'homéopathie et la naturopathie font aussi partie de ses prérogatives.

Aujourd’hui, l’Ayurvéda est enseignée dans les universités indiennes même si certaines sciences ont été perdues comme la chirurgie.

Mais ne devient pas médecin ayurvédique qui veut. Sept ans d’études sont nécessaires pour acquérir les bases. C’est à l’issu de ces sept années que le futur médecin ayurvédique choisit sa spécialisation : massage, médecine, pharmacopée ou alimentation qu’il va ensuite étudier à nouveau pendant 7 ans. Ce n’est qu’à la fin de 14 ans d’études qu’il est autorisé à toucher son premier patient. Il exerce alors soit en cabinet soit à l’hôpital. En Inde, plus de la moitié de la population continue de se faire soigner ainsi.

Ayurvéda et Médecine allopathique travaillent en collaboration, chacune des deux connaissant les limites et les atouts de l’autre.

Mais même en Occident tout était tracé par Hippocrate (-460 env., -377 env. av. J.C.). Il a été le premier à mettre en avant l’importance de l’alimentation dans la santé. Il ouvrit la voie en prônant l’utilisation de végétaux. Dans son ouvrage « De l’aliment », il met en avant 4 principes alimentaires :

1- La digestion est une cuisson des aliments

2- Pour faciliter la digestion, il est préférable de manger des aliments cuits

3- Le corps est composé d’éléments ou d’humeurs qui déterminent le tempérament

4- Il est recommandé de manger une nourriture équilibrée c’est-à-dire des aliments correspondant à son tempérament.

La médecine hippocratique était considérée en son temps, comme un art et une science reposant sur deux impératifs alimentaires :

  • la nécessité d’adapter des aliments sains à la nature humaine : cela impliquait de les cuire, donc de les différencier des animaux.

  • il était impératif de modifier et d’adapter le régime alimentaire des patients malades en fonction de leur état afin d’éviter les souffrances et la mort.

De ce fait, on classait les aliments en fonction de leur correspondance avec des 4 éléments (eau, terre, air, feu) qui correspondent aux 4 tempéraments définis par la

« théorie des Humeurs » (lymphatique, mélancolique, sanguin et colérique).

Aujourd’hui au XXIème siècle, nous pouvons légitimement nous interroger : que s’est-il passé depuis la période d’Hippocrate pour que tout le travail de ce médecin grec soit écarté ?


SPL : Est-ce qu’en ayurvéda on parle des 4 éléments et des Humeurs ?

AAS : Selon la doctrine ayurvédique, comme je l’ai dit, chaque être humain est un cosmos en miniature, constitué des 5 éléments de la Nature :

  • Le vent et l'air déterminent la nature d'un être et sa prédisposition à telle ou telle maladie.

  • Le feu, entre autres effets, transforme la nourriture en énergie et crée des impulsions.

  • L’eau est un élément vital et caractérise le changement.

  • La terre, quant à elle, est le caractère de la personne.

  • Et l’éther, sa personnalité dans un environnement.

Lorsqu’un individu connaît sa constitution, il peut alors définir par exemple l’alimentation et le style de vie qui lui conviennent le mieux. Mais la nourriture adéquate d’une personne peut devenir un « poison » pour une autre ! Ainsi si cette personne veut avoir une vie saine, heureuse et équilibrée, la connaissance de sa constitution est absolument nécessaire. Or, l’alimentation en Occident est devenue une jouissance plutôt qu’un mode de vie.

Cette médecine ne manque pas d'esprit scientifique, elle a progressé au-delà de la science mécanique.

L'Ayurvéda en tant que médecine est une médecine préventive plus que curative. Comme le dit le Docteur Robert E. Svoboda « Elle équilibre et régénère les organismes vivants, réduisant leurs prédispositions et renforçant leur immunité pour prévenir le développement de nouvelles maladies »[1].

Ainsi l’homme doit apprendre à vivre avec son environnement, coopérer avec la nature et à vivre en harmonie avec elle plutôt qu’un système biomédical.


SPL : Et les Humeurs ?

AAS : Nous portons tous en nous les cinq éléments mais dans des proportions, formes et localisations différentes, nous donnant des caractéristiques uniques. Ces éléments vont se combiner par deux pour constituer les humeurs biologiques appelées

« doshas » au nombre de 3 : Vata, Pitta, Kapha.

Avant d'établir un diagnostic, le vaidya autrement dit le médecin ayurvédique, détermine la nature profonde de son patient selon l'équilibre de ses doshas.

Les 3 doshas cohabitent en chacun de nous mais généralement un dosha domine voire deux. Ce dosha dominant détermine notre constitution de base à la fois au niveau corporel, cérébral et spirituel. Il reflète nos énergies et qualités, principalement notre mode de réaction et d’accommodation à notre environnement mais aussi nos faiblesses. Il n'y a pas de constitution meilleure qu'une autre simplement des modes de fonctionnement différents et donc des thérapies et des conseils différents à appliquer.

Les doshas sont un outil de prévention et de connaissance de soi. Ils ont deux types d'actions sur l'organisme : ils le soutiennent quand ils sont équilibrés et le détruisent quand ils sont déséquilibrés.

En Ayurvéda, il est donc essentiel de connaître son ou ses doshas dominant et ses/leurs caractéristiques pour prévenir la maladie en détectant ses points faibles et en adaptant son mode de vie. Selon les éléments qui le composent, chaque dosha a lui aussi des gunas (« qualités fondamentales »). Or l'un des principes phares de l'Ayurvéda est que le semblable augmente le semblable. Par exemple : un climat froid et sec aura tendance à augmenter le dosha Vata. L'idée est donc d'éviter les éléments (aliments, huile végétale, environnement, etc.) ayant les mêmes qualités que son dosha afin que celui-ci ne soit pas en excès et ne crée un déséquilibre. Il s’agit donc d’un travail en opposition.

Connaître son dosha n'est pas seulement important pour préserver sa santé. On peut considérer les doshas comme des outils de développement personnel. Ils fournissent une grille de lecture pour une meilleure connaissance de soi sur le plan physiologique mais aussi relationnel et émotionnel. Ils permettent de confirmer nos intuitions sur ce que nous sommes, nos dons, nos facilités. Pour autant rien n'est figé. Notre dosha dominant pose les grandes lignes de notre tempérament mais ne nous enferme pas dans une manière d'être. D’une part car il est rare d'avoir un tempérament pur c'est-à-dire de correspondre à tous les traits de son dosha, d'autre part en Ayurvéda, tout bouge, évolue, se transforme. Les doshas varient donc tout au long de notre vie en fonction des choix que nous faisons.


SPL : En Occident, l'Ayurvéda est principalement connue par les massages mais qu’en est-il réellement ?

AAS : Appelés Jarahara, littéralement « destructeur de vieillesse », les massages sont l’un des outils thérapeutiques phares de l’Ayurvéda et sont totalement intégrés dans le quotidien des Indiens. En Occident, ils constituent souvent une porte d’entrée simple dans le monde de l’Ayurvéda.

Il existe des dizaines de massages dont les protocoles sont consignés dans les textes védiques. Ce sont de véritables soins thérapeutiques dont la gestuelle et les adjuvants ont des actions bénéfiques et spécifiques sur les doshas et les tissus.

Le massage consiste en pressions sur différents points (marmas) au travers desquels le prâna[2] se déplace. A la fois relaxant et énergétique, il permet de se décontracter, de dénouer les muscles redonnant ainsi toute l’énergie nécessaire. Il prévient et gère le stress ainsi que le manque de concentration. Il stimule l’élimination des toxines, lutte contre la fatigue, les insomnies et la dépression et facilite la circulation veineuse.

Le massage Abhyanga, massage du corps dans sa totalité, apporte autant au physique qu’à l’esprit. Parmi ses nombreux bienfaits on retiendra : la stimulation des circulations veineuse, artérielle et lymphatique, l’apaisement du système nerveux, la fortification des poumons et du cœur, la tonification des muscles et de l’ensemble de la physiologie, la lubrification des articulations, l’élimination des impuretés de l’organisme, l’augmentation du niveau de résistance au long de la journée, l’amélioration du sommeil, la libération des toxines de l’organisme et de la nourriture absorbée par les tissus, l’amélioration du travail de digestion et d’élimination, etc. Une attention particulière est portée au niveau du ventre, siège des nombreuses tensions émotionnelles. Une pratique régulière améliore la concentration, l’intelligence, la confiance en soi, la jeunesse et la mobilité du corps et de l’esprit.

Ensuite on trouve le Shirodhara, que tu as pu expérimenter lors de ton séjour en Inde. Ce soin est basé sur l’écoulement d’un mince filet d’huile sur le haut du front et adapté au receveur. Ce massage conclut généralement une série de soins de relaxation, de remise en forme et de purification. Il est remarquable pour éliminer le stress, l’anxiété, les insomnies, la fatigue et les problèmes liés à la tête.

Le massage crânien, transmis de génération en génération, s’inscrit dans le quotidien de nombreuses familles indiennes afin de soulager tensions musculaires et stress. Il agit principalement sur la circulation du prâna. Il favorise la circulation sanguine et le fonctionnement du circuit lymphatique, l’élimination des toxines et cellules mortes, la réduction de la vulnérabilité au stress, facilite le dégagement des sinus, la diminution ou l’évitement des maux de tête et des migraines, stimule la peau, le cuir chevelu, ralentit la chute des cheveux, et améliore le sommeil.

La sudation ou Swedana, fait également partie intégrante de la thérapeutique ayurvédique. On dénombre 7 types de sudation en fonction de la chaleur utilisée (sèche ou humide) et de la méthode de sudation (caisson à sudation, application de cataplasmes chauds, etc.).

« Celui qui prend soin de son corps vit plus longtemps » telle est la philosophie de l’Ayurvéda. Rééquilibrer les forces qui sont à l’intérieur de chacun de nous, tel est son principe.

SPL : Comment se fait ce rééquilibrage ?

AAS : Ce rééquilibrage se fait grâce à des gestes, soins et thérapeutiques variés allant de l'alimentation aux massages en passant par la phytothérapie, le yoga, les soins d'hygiène, la méditation mais aussi un état d'esprit, une manière d'être à soi et aux autres et à l'Univers.

L’Ayurvéda représente une médecine sociale dont la particularité soigne le malade et non la maladie. Elle se divise en 8 branches : la médecine générale, la chirurgie, la médecine ORL et l’ophtalmologie, la toxicologie, la psychiatrie, la pédiatrie, la gériatrie et les thérapies de rajeunissement, la science des aphrodisiaques[3] et de l’énergie.

En Ayurvéda, le corps humain appartient à l’énergie cosmique appelée prâna. Il est relié au monde par les 5 sens grossiers que nous projetons sur les 5 sens subtils :

  • Par l’ouïe, c’est l’élément espace qui est généré.

  • Par le toucher, c’est l’élément air.

  • L’élément feu est projeté par la vue.

  • L’élément eau appartient au goût

  • L’élément terre est la base de l’odorat.

C’est pour cela que lorsqu’un kapha (Terre) est déséquilibré, par exemple, on va intervenir au niveau de son odorat. Pour une personne de constitution Vata (air), on va lui proposer des massages. Quant à Pitta (feu), on va travailler par des bains d’huile sur les yeux.

Chaque élément a ses qualités fondamentales décrites par dix paires d'opposés selon le principe de nature dualiste de la matière : par exemples lourd / léger, froid / chaud, visqueux / rugueux… qui permet un travail en opposition.


SPL : Donc si je comprends bien, selon l’Ayurvéda, la santé c’est un état

d’équilibre ?

AAS : Oui. La conception de la santé en Ayurvéda découle directement du concept de dosha et de leur gunaou qualité. Elle fait ainsi appel à un grand sens de l'observation et invite tout un chacun à se responsabiliser.

Dans la pensée ayurvédique, chacun est responsable de son état de santé. La prévention est essentielle.

Dès lors que l'on connaît son corps, son mode réactionnel et sa capacité de défense il est possible de devancer la maladie.

Dans les textes védiques, la santé est définie comme « le fonctionnement équilibré des doshas, des tissus, du métabolisme, des enzymes, des déchets et de l'état de satisfaction des sens, du mental et de l'âme » (Sushruta Samhita 15.48). L'Ayurvéda est une approche holistique qui ne cantonne donc pas la santé à un état de fonctionnement optimum de l'organisme mais à un état d'équilibre général entre le physique, l'âme et l'esprit en accord avec le contexte et l'environnement.

Cet équilibre dépend de 3 piliers : l’alimentation (Ahara), notre routine et hygiène de vie (Dinacharya), notre état d’esprit (Manovyapara).

Les doshas gouvernent l'ensemble des fonctions biologiques, psychosomatiques et bioénergiques. Ils entraînent une réaction particulière de la personne vis-à-vis des événements, de l'alimentation, de l'entourage et de l'environnement. Si ces éléments ne sont pas adaptés au dosha, un déséquilibre peut s'installer.

La maladie est ainsi considérée comme la conséquence d'un déséquilibre dû à l'aggravation des doshas dans l'excès ou dans le manque.

Elle n'arrive pas du jour au lendemain mais s'installe progressivement en envoyant des signes précurseurs. La maladie représente un processus en évolution. Elle est la finalité d'un déséquilibre qui commence par s'exprimer par différents signes, douleurs ou inconforts dus à l'accumulation de toxines.

L’Ayurvéda repose ainsi sur une bonne connaissance de soi et une observation attentive de son corps. En Inde, le corps a la parole. Les symptômes sont le seul moyen dont dispose l'organisme pour dire la difficulté qu'il éprouve à se réguler lui-même. Mal de dos, douleurs aux cervicales, crampes, brûlures d'estomac, maux de tête, l'Ayurvéda invite à prêter attention à tous ces petits signes. Les Indiens ne sont pas hypocondriaques pour autant. Cette écoute bienveillante du corps fait partie de leur mode de vie, de leur philosophie.

Cette qualité d'observation est par ailleurs essentielle pour la guérison. Un déséquilibre ou une maladie contiennent en eux-mêmes un processus de régulation ou d'appel au rééquilibrage car les signes qui présentent la maladie permettent de comprendre l'origine du déséquilibre et comment les réguler. En Ayurvéda, on considère ainsi qu'il n'existe pas de maladie qui ne possède ses éléments de guérison à l'exception de certaines maladies génétiques orphelines. Les soins ayurvédiques vont aider à ramener le corps et l'esprit à leur état naturel d'équilibre par l'intermédiaire de changements des habitudes de vie et alimentaire, des plantes, des massages, des soins d'élimination, des exercices de yoga, de la méditation mais aussi d'un état d'esprit positif et bienveillant. Toujours dans un souci d'équilibre et d'harmonie avec la nature, ces traitements respectent les rythmes saisonniers, l'alternance des doshas, les cycles du corps.


SPL : Quelle est la place de l’alimentation dans l’ayurvéda ?

AAS : L'alimentation est l'un des piliers de l'Ayurvéda. Le choix des aliments, notamment ceux de saison, leur préparation, les épices qui les accompagnent, l'ambiance, les horaires des repas, la cuisine et la dégustation des plats font pleinement partie de la bonne santé.

En Ayurvéda, on ne pense pas à l'alimentation en termes de vitamines, de protéines, de graisses : on raisonne plutôt en « énergies ».

Les aliments possèdent tous un guna (propriété ou qualité), un dosha et un effet soit chauffant soit rafraîchissant sur l'organisme. De plus, chacun d'eux présente également un ou plusieurs goûts issus de l'association de l'eau contenue dans la salive et des combinaisons des 5 éléments. Bien se nourrir en Ayurvéda consiste donc à choisir avec précaution son carburant de façon adaptée à ses caractéristiques individuelles, son dosha principalement mais également celui de la saison pour garder un équilibre bénéfique car la fonction digestive est l'élément clé de notre bonne santé.

Si la digestion est liée aux enzymes digestives c'est agni (ou feu digestif qui correspond à l'ensemble des fonctions et réactions enzymatiques permettant la digestion) qui est au cœur du système et comme tout feu il doit être entretenu. L’Ayurvéda estime qu’agni est parfait quand l'appétit est régulé, la digestion aisée. S'il est trop faible, alors nous assimilons mal : le corps s'alourdit et se fatigue, nous perdons notre énergie mais aussi notre joie de vivre. Pour nourrir ce feu il faut non seulement respecter certains horaires mais également manger des aliments sains qui nous correspondent, dans une atmosphère paisible. On peut le stimuler avant le repas en consommant quelques aliments plutôt aigres comme les pickles ou une fine tranche de gingembre frais. Pendant le repas mais également à la fin on évite tout ce qui est froid notamment les glaces qui viennent perturber les enzymes et donc la digestion ; on boit un peu par petites gorgées et tiède (eau ou tisane).

Contrairement à ce que l'on croit souvent, la cuisine ayurvédique n'est pas strictement végétarienne. Elle utilise notamment le ghee (beurre clarifié) pour cuisiner ainsi que les produits laitiers. On peut aussi consommer de la viande, du poisson, des œufs mais ils ne sont réellement nécessaires que pour Vatatoujours avec modération et dans les périodes de convalescence ou au maximum 3 fois par semaine. Au menu, avant tout, des produits frais, fruits et légumes, céréales, produits laitiers, légumineuses. On ne cuisine et on ne mange que du frais jamais de conserves, de plats tout préparés, ou même de surgelés. On essaie de consommer ce qui a été cuisiné le jour même au maximum le lendemain mais pas après. Les produits sont toujours choisis de saison idéalement bio ou au minimum locaux. On mange chaud à la limite tiède mais pas froid quitte à réchauffer car la chaleur est la première étape de la digestion laquelle en sera facilitée. Ainsi la plupart des végétaux sont consommés cuits ou tiédis et les crudités sont réservées aux déjeuners estivaux. Enfin chaque repas doit associer les 6 saveurs de l'Ayurvéda : doux (sucré), salé, acide, amer, piquante et astringente. Cela ne se traduit pas obligatoirement par des plats compliqués mais par de bonnes associations d'aliments et d'épices.

Comme pour tout en Ayurvéda se nourrir ne doit pas être pris à la légère. Rien de pire que d'avaler un sandwich en vitesse devant un écran mais cela ne veut pas dire non plus qu'il faut passer des heures en cuisine pour rester en bonne santé. Les 5 règles à suivre pour bien manger selon l'Ayurvéda sont :

  • Manger seulement quand on a faim (et non par simple envie de manger ou par habitude sociale), copieusement pour être assez rassasié mais ne pas dépasser son appétit et jamais se remplir. La règle est que l'estomac soit rempli d'un 1/3 de solide, 1/3 de liquide et 1/3 de vide ce qui lui permet de se contracter plus aisément.

  • Manger dans un endroit agréable, au calme, lentement et en conscience. Les plats sont joliment présentés pour profiter pleinement des saveurs et des textures, des senteurs et de leur aspect visuel ce qui là encore favorise la digestion grâce aux enzymes salivaires.

  • Bien mâcher ce qui contribue à une bonne digestion jusqu’à la mise en place de la sensation de satiété.

  • Manger des plats digestes c'est-à-dire qui ne provoquent ni lourdeur ni troubles digestifs ni sensation de fatigue ni intolérance ou allergie.

  • Ne pas passer des heures à table, même s'ils sont goûteux les repas doivent rester simples et rapides.

En Ayurvéda, les aliments, en fonction de leur saveur, nourrissent, équilibrent ou affaiblissent notre doshadominant : en fonction de celui-ci certains d'entre eux sont donc recommandés ou à l'inverse déconseillés. En outre quand on souffre d'un excès de tel ou tel dosha on peut le compenser naturellement en consommant des aliments aux propriétés inverses : on rééquilibrera par exemple un excès de Vata en mangeant des aliments Pitta et Kapha alors que des aliments Vata aggraveraient la situation.

En cuisine comme dans le reste en Ayurvéda tout est question d'équilibre.

On privilégie les cuissons lentes et douces pour respecter et ne pas dénaturer l'énergie des aliments (pas de grill violent ou d’autocuiseur, pas de surcuisson ou d'excès de gras). La plupart des plats sont servis en bouillons et non pas secs ce qui pourrait contrarier la digestion et la rendre plus difficile : le ghee, les produits laitiers, le lait de coco, les huiles végétales permettent ainsi d'obtenir des plats onctueux. On évitera d'associer certains aliments qui ne doivent pas être mélangés car cela crée un déséquilibre des doshas. Ainsi par exemple pas de crustacés ou de poissons et de produits laitiers dans le même plat, pas de mélange chaud et froid, pas de miel dans une tisane chaude et plus généralement pas de miel chauffé et pas de mélange entre légumineuses et protéines animales ce qui rend la digestion difficile et provoque une accumulation de toxines.


SPL : En Ayurvéda pas de cuisine sans épices. En tant que chef de cuisine indienne et ayurvédique depuis 20 ans et qui étudie les épices depuis 30 ans, en quoi les épices sont importantes pour toi ?

AAS : Les épices sont des anti-oxydants que l’on n’utilise pas seulement pour donner du goût et moins saler mais également pour donner du relief au plat et bénéficier de leurs effets santé en fonction de son dosha.

Le choix des épices mais également leur conservation sont importants, mais surtout leur cuisson et leur activation. Cuisiner ces alicaments est un art pour qu'elles dégagent tous leurs arômes mais également tous leurs bienfaits. Chaque épice a ses propriétés et ses bienfaits et agit différemment sur le corps selon si elle est consommée, en poudre, en graine ou en feuilles. Les épices en poudre vont agir au niveau du sang et du système sanguin, les épices en graines au niveau du cerveau quant aux épices en feuille elles vont agir au niveau de la peau.

On utilise aussi les épices pour rééquilibrer les doshas. Ainsi par exemple face à un dosha Pitta (feu) en déséquilibre, on déconseillera la consommation de piment, la noix de muscade ou du macis (peau de la noix de muscade) mais on préconisera le cumin. Pour réduire Kapha (terre), on consommera préférentiellement le clou de girofle, la coriandre, le cumin et le curcuma. Et chez un Vata (air) déséquilibré, on conseillera la badiane et la graine de moutarde.

Les épices comme la cannelle sont utilisées pour réduire l’indice glycémique des aliments. Le poivre noir, lui, augmente la biodisponibilité des aliments avec lesquels il est mangé. Quant au cumin, il va faciliter la digestion des produits laitiers tout comme l’asafoetida qui facilite celle des aliments lourds ou gras et des légumineuses.

Quant à la consommation de sel on préfèrera le sel rose de l’Himalaya moins fatiguant pour les yeux et moins hydro rétenteur que le sel marin.


SPL : Tu es aussi professeur de yoga. Quel est le lien entre le yoga et la cuisine ?

AAS : La pratique du yoga est incontournable en ayurvéda. Bien loin d'être un simple exercice d'assouplissement et de relaxation et encore moins un sport. Cette discipline ancestrale vise à harmoniser le corps et l'esprit dans une approche globale de l'être.

Yoga signifie « union » du corps, de l’esprit et de l’âme. De ce point de vue, tout peut être yoga si cela est fait en conscience ! Ce que l’on appelle yoga est donc un ensemble de techniques physiques (asana), respiratoires (pranayama) et mentales (méditation) pour travailler à cette union qui correspond à un état de bien-être parfait. Il en existe de nombreuses variantes et l’approche ayurvédique du yoga en est une à part entière où l’on cherche à diminuer le déséquilibre des doshas pour retourner à son état de santé. Les positions (asanas) et les exercices de respirations du yoga sont choisis selon ton déséquilibre (vikruti) ou les organes visés. Le but remettre en marche les organes et équilibrer les doshas.

Pour les médecins ayurvédiques beaucoup de nos maladies et troubles de la santé (troubles digestifs, nervosité, fatigue, tensions, maux de tête, etc.) découlent de notre mental et de nos différentes émotions.

Si l'Ayurvéda est la médecine du corps, le yoga et la méditation sont la médecine du mental et des émotions.

Ils sont les garants de la santé psychique et émotionnelle. Dans les textes anciens, le yoga est défini comme le moyen de calmer les fluctuations du mental. La respiration (pranayama) aide à rétablir la stabilité psychique et émotionnelle qui va se répercuter positivement sur le corps. Les postures (asana) favorisent l'élimination des toxines et les tensions physiques permettant ainsi de refaire circuler une bonne énergie dans le corps synonyme d'harmonie, d'équilibre et de bonne santé. Le yoga est une discipline très rigoureuse et subtile où la justesse de la posture mais aussi surtout de la respiration sont la clé. Une pratique avec des professeurs non avertis, peut avoir des effets dévastateurs. D’où l’importance de bien choisir ton professeur de yoga qui avant de commencer à t’enseigner doit t’interroger sur ton état de santé. Les cours collectifs sont inappropriés pour résoudre des problématiques spécifiques. Pour entretenir un état de bonne santé, préfère les cours collectifs de Pilate ou de fitness.

Les neurosciences prouvent aujourd'hui les bénéfices du yoga sur le cerveau et le système physiologique.

Agir sur le corps avec les asanas c'est agir sur le mental et les émotions.
Agir sur le mental avec la méditation c'est agir sur le corps et les émotions.
Agir sur les émotions par la respiration c'est agir sur le corps et le mental.

Le yoga est et doit être ouvert à tous de tout âge et de toute condition sociale. En Inde les jardins publics ou places publiques regorgent de gens qui très tôt le matin pratiquent les asanas dans leur coin. La finalité du yoga n'est pas de tenir la posture mais de travailler le « prâna » c'est-à-dire la respiration et l’énergie vitale. C’est par la maîtrise d'une bonne respiration que l'on peut effectuer l’asana et non l'inverse et ainsi résoudre le désordre intérieur.

Les études en laboratoire en Allemagne montrent que les personnes pratiquant le yoga ont moins de risque d’infarctus du myocarde : la pression sanguine baisse ainsi que les rythmes respiratoires et cardiaques. Les patients disent se sentir mieux, moins souffrir du dos et de la tête.

Le yoga agit sur la constipation, la digestion, le mental, la réduction du stress et de l’anxiété, le sommeil en luttant contre l’insomnie et le sommeil agité, les émotions (en les apaisant), la déprime, l’excédent de poids et les hormones.


SPL : Tu disais que la médecine chinoise découle de la médecine ayurvédique. En MTC on parle beaucoup de points énergétiques stimulés par l’acupuncture. Qu’en est-il en Ayurvéda ?

AAS : En Ayurvéda, on parle de « marmathérapie ». Un des chapitres les plus importants du Sushruta Samhita traite de certaines parties du corps particulièrement sensibles appeler les « points marmas ». « Mar » signifie en Sanskrit « Tuer » autrement dit « point mortel ou vulnérable ». Ce mot suggère également ce qui est caché et sacré. Ces points sont des centres vitaux et énergétiques. Ils correspondent à des points de jonction et de croisement des vaisseaux sanguins, de nerfs et d'organes. Il décrit ainsi 117 points marmas très connus dans le Kalaripayât (art martial indien).

Les Marmas sont reliés par les Nadis, les canaux énergétiques du corps subtil, qui sont au nombre de 72.000, dont 14 majeurs qui sont reliés aux principaux organes du corps humain. Les Nadis sont eux-mêmes en contact avec la peau. Toucher la peau par acupression pour stimuler les Marmas et les Nadis permet d’harmoniser la circulation de l’énergie vitale dans tout le corps selon les Yogis.

75 des 117 points principaux correspondent exactement aux points énergétiques de la médecine traditionnelle chinoise. 

Du temps de Sushruta, l’Ayurvéda comptait plusieurs disciplines, dont la chirurgie à laquelle il a fortement contribué. Il était notamment réputé pour avoir réalisé des chirurgies plastiques sur des personnes. L’enjeu de son travail était de réaliser le minimum de dommages lors des opérations en prenant les Marmas en compte. Ces points étaient également utilisés pour l’anesthésie au cours des traitements dentaires, ainsi que pour la réanimation.

Par la suite, la connaissance des Marmas s’est approfondie et généralisée à travers la pratique du Panchakarma qui vise à purifier le corps dans le cadre de cures nettoyantes et détoxifiantes pour équilibrer les doshas, restaurer l’équilibre dans la constitution de l’individu ce qui lui permet de recouvrir la santé.

Les Marmas sont le siège de la force vitale et de son expression dans le corps. Ils servent de véhicule à la communication entre les cellules, du fait que leur stimulation libère des substances qui vont voyager dans le corps dans le but de maintenir l’homéostasie, ainsi que la coordination des cycles.

En Marmathérapie, chaque point énergétique est relié à un faisceau de fonctions, d’organes qui influent tant au niveau du corps, que de l’esprit, ou même des émotions. Une douleur ressentie à la pression sur le site d’un Marma est le signe d’une fragilité, d’une impureté ou d’un déséquilibre dans la zone et/ou la fonction associée à ce point. Par conséquent, le Marma donne aussi des indications sur l’état de santé de la personne lors du bilan. La manière de toucher le Marma est cruciale, car selon le type de mouvement et de pression employée, les doshas peuvent être stimulés ou pacifiés.

Ainsi, la Marmathérapie aide à éliminer les déchets d’aliments non digérés qui restent stockés dans les tissus au lieu d’être évacués, traiter les problèmes de circulation dans les grands canaux, les veines, les artères, le réseau lymphatique et énergétique, traiter les dysfonctionnements des organes, apaiser la douleur, stimuler ou équilibrer agni, ce qui permet de rétablir une bonne digestion et une bonne assimilation des aliments, apaiser l’esprit et gérer les émotions, favoriser la clarté de l’esprit, la prévention et le rajeunissement.


SPL : Avec l’âge les problèmes articulaires peuvent toucher chacun de nous. Je pense notamment à l’arthrose ou à l’arthrite. Est-ce que l’Ayurvéda peut intervenir et si oui comment ?

AAS : L’Ayurvéda identifie deux types majeurs de désagréments articulaires :

  • Le premier type est associé à la mauvaise nutrition des articulations ou la faible densité osseuse et dans l’ensemble une faiblesse générale des articulations. Il faudra alors avoir le réflexe curcuma qui, ajouté à une infime quantité de poivre noir pour augmenter sa biodisponibilité, va agir sur les cellules en profondeur pour les protéger. Effet collatéral de cette association : elle a une action anti-inflammatoire qui va apaiser les douleurs.

  • Le deuxième type est associé à une surcharge toxique dans les articulations et est le résultat d’une trop grande quantité de toxines dans le corps. Comme les amas (les déchets collants et toxiques provenant d’une digestion incomplète) s’accumulent dans les articulations, ceux-ci créent tout d’abord une raideur et une lourdeur qui peut mener à de sérieux problèmes d’articulations. C’est notamment l’arthrite.

L’émotion est un facteur important de l’arthrite. Une émotion instable peut causer des dommages en forçant le mental à rechercher des issues pour échapper à sa condition au moyen d'activités obsessionnelles. Une émotion perturbée qui se prolonge dans le temps semble également jouer un certain rôle. L’arthrite rhumatoïde est trois fois plus courante chez les individus qui ont été adoptés dans leur enfance que chez ceux qui ont grandi avec leurs parents génétiques. Les victimes d'arthrite sont souvent psychologiquement rigides et inflexibles.

Dans son livre « Prakriti : votre constitution ayurvédique », le Docteur Robert E. Svoboda[4] écrit que « le premier pas à envisager pour lutter contre les rhumatismes articulaires est probablement de reconnaître que le corps a sans doute été contraint de subir des conflits afin de protéger le mental et l'empêcher de se confronter à des sentiments confus ou refoulés. Si le patient peut admettre à lui-même qu'il est possible qu'il ait ce genre de conflit interne et qu'il peut exprimer la volonté de s'en occuper enfin, il a fait le premier pas vers la guérison ».

Un travail thérapeutique sur les émotions associé à des mesures physiques adéquates est suffisant pour contrôler la maladie en particulier si celle-ci est principalement due à une alimentation incorrecte et que les causes émotionnelles ne sont que secondaires. Même si la cause principale reste les émotions, le soulagement ressenti sur les articulations accroîtra la confiance du patient sur les possibilités de guérison rendant plus facile le traitement de son mental par la suite quand il sera prêt à s'y engager.

Un régime alimentaire stricte adapté est conseillé en Ayurvéda en phase d’aggravation. L’inflammation est probablement due à l’allergie à un ou plusieurs aliments consommés couramment. Et même s’il n’y a pas d’allergie alimentaire, il est nécessaire d’éliminer durant minimum six semaines toute graisse animale, toute friture, tout produit laitier, tout aliment glacé sortant du réfrigérateur, tout sucre blanc, tout alcool, toute plante de la famille des solanacées (comme la pomme de terre, la tomate, l’aubergine, le poivron, le tabac par exemple), réduire la quantité de sel et boire de l’eau tiède. Mais aussi éliminer l’aluminium de sa consommation (déodorant, poudre à lever, ustensiles de cuisine). La transpiration, les cataplasmes de plantes médicinales sur les articulations, l’utilisation de l’huile de ricin, les bains de soleil permettent aussi de réduire l’inflammation. Les saveurs amères et piquantes dans l’alimentation (que l’on peut trouver en Occident sous forme de compléments alimentaires) sont utilisées pour dissiper ama. L’huile de ricin est un remède spécifique des affections rhumatismales.

De simples postures de yoga et exercices respiratoires favorisent l’élimination d’ama. Un programme d'exercices réguliers est particulièrement important pour les personnes souffrant d'arthrite qui sont en surpoids étant donné que la lourdeur des membres exerce une pression supplémentaire sur les muscles et les articulations. Il est préférable de pratiquer ces exercices dans l'eau où le poids du corps est partiellement soutenu et que le stress porté sur les articulations est de ce fait réduit.

En Ayurvéda on considère que la cortisone et autres médicaments anti-inflammatoires comme le phenylbutazone constituent d'autres mesures à court terme qui peuvent être nécessaires à l'occasion pour éviter de sérieux dommages articulaires. Elles ne doivent cependant pas être utilisées continuellement car d’une part elles ont des effets secondaires sur l’organisme et d’autre part elles ne s'attaquent pas à ama qui est la cause du problème. Même les analgésiques « ordinaires » doivent être utilisés avec précaution à cause de leurs effets secondaires sur l’organisme. Si le corps manifeste une douleur c’est sa façon à lui de nous dire de mettre le membre au repos.

Il a été démontré que la méditation qui permet aux gens de séparer leurs pensées et leurs émotions de leurs sensations physiques réduisait énormément la douleur et améliorait le moral des victimes de douleurs chroniques. Et dès qu’arrive la période de rémission, il est conseillé de s’occuper des conflits émotionnels cause de la maladie.

Toujours selon l’Ayurvéda, l’arthrite est un trouble du dosha Vata. Pour stimuler la digestion et favoriser l’élimination d’amas évoqués, l’Ayurvéda recommande une association de trois épices : le trikatu. En effet, le gingembre qu’il contient élimine les gaz, le poivre noir régule la température du corps, voire l’échauffe légèrement pour mieux « brûler » les aliments et le poivre long aide à la digestion.

Quant à l’arthrose, elle peut être apaisée avec des gels articulaires ou de l’argile verte appliqués directement sur les articulations douloureuses. Par ailleurs l’harpagophytum ou le boswellia, deux végétaux riches en substances actives, se révèleront utiles pour soulager les douleurs. La pratique d’un sport doux tel que la natation chauffera aussi les cartilages et les entretiendra au quotidien. Enfin une alimentation légère, riche en crudités, fruits et poissons mais pauvre en toxines est conseillée.

L’Ayurvéda a compris depuis longtemps que l’attitude que l’on a à 20 ans impacte directement le bien-être à 60 ans. C’est pourquoi cette méthode de soin a développé une véritable connaissance et prise en charge du corps dès le plus jeune âge.

Ainsi dès la naissance d’un bébé en Inde, ses parents le massent chaque jour. Ce massage appelé « Shantala » : va stimuler son système immunitaire, l’aider à traverser les phases de croissance sans douleur et l’habituer à préserver son corps. Le massage se pratique simplement et doit faire partie du rituel de soins quotidiens, au même titre qu’une toilette ou le brossage des dents.

Les personnes qui souffrent de douleurs articulaires ou qui travaillent toute la journée sur ordinateur apprécieront particulièrement un massage des doigts. Agréable effet collatéral du massage : le contact avec la peau, associé à la pression légère exercée sur le corps, stimule certaines hormones notamment l’ocytocine.

Alors que l’Ayurvéda considère que la protection des articulations se fait tout au long de la vie et que l’Occident attend trop souvent d’en souffrir pour agir, il existe un point sur lequel les deux pratiques se rejoignent : le surpoids est un facteur aggravant.

L’Ayurvéda préconise donc d’utiliser des plantes telles que le Coleus ou le Garcinia pour mincir et retrouver rapidement une certaine légèreté. La perte de poids passe également par un bon transit, fluide et efficace, que l’on retrouve notamment avec le Triphala, un complexe de trois baies.

L’Ayurvéda dispose donc de nombreux « outils » pour préserver ses articulations tout au long de la vie :

  • Améliorer la digestion avec des épices pour produire moins d’amas.

  • Apaiser les douleurs en cuisinant avec les épices comme le cumin, la coriandre, le gingembre, asafoetida, ail et fenouil est important. Et surtout saupoudrer autant que possible tous les légumes de curcuma : c’est un anti-inflammatoire particulièrement efficace, surtout s’il est combiné avec une dose (même infime) de poivre noir.

  • En prévention ou dès les premières douleurs articulaires, faire une cure de boswellia. Pratiquer un massage corporel avec une base d’huile de sésame ou de lin afin de réduire Vata et donc la douleur. Masser plus longuement par des mouvements spécifiques sur les articulations endolories.

  • Consommer de la vitamine C qui contribue à réduire les douleurs du squelette. Elle se trouve en grande quantité dans l’Amalaki ou Amla (fruit).

  • Les légumes et les soupes sont à déguster sans limite.

  • Avoir une bonne hygiène de vie, sans tabac, ni alcool.

  • Garder à l’esprit que « qui s’arrête rouille » et que l’activité physique est donc indispensable au bien-être articulaire.


SPL : Pourquoi l’Ayurvéda prend de plus en plus d’importance dans notre monde actuel ?

AAS : Tu l’auras compris, ce système de santé et de bien-être perçoit l’homme dans son intégralité : le corps physique et le monde subtil comme des éléments interdépendants reliés à l’environnement qui nous entoure. Bien plus que cela, il s’agit d’un paradigme. L’Ayurvéda est important dans notre monde actuel car il nous permet de nous ré-approprier un savoir basé sur un processus essentiel, celui de La Vie. 

La connaissance de ce processus nous permet de comprendre le fonctionnement de notre métabolisme et de notre environnement et donc de faire des choix éclairés en ce qui concerne notre santé, notre longévité, et par extension la perception que nous avons de nous-même et de ce qui nous entoure.

Observer le vivant comme un ensemble et pas comme une accumulation de fragments, nous amène à saisir les lois qui le structurent, à comprendre les dynamiques qui sont en œuvre et à établir des liens. A titre d’exemple, il suffit de porter son attention sur l’alternance et les répétitions de cycles à l’échelle d’une journée, des saisons…

Si l’on a pu considérer un temps cet attrait pour des soins différents comme marginal, il constitue désormais une forme importante de la médicalisation des sociétés occidentales que personne ne peut ignorer.

L’industrialisation trop rapide et le développement encore plus rapide des nouvelles technologies depuis plus d’une centaine d’années ont créé une sédentarisation des travailleurs aggravée l’an dernier par le développement accru du télétravail. Face à ces phénomènes, la médecine allopathique occidentale n’a pas eu le temps de s’adapter. Aujourd’hui, le temps est venu de prendre les médecines complémentaires comme un partenaire, un allié pour un meilleur accompagnement et une meilleure prise en charge du patient dans sa globalité.


Article rédigé avec la participation de :

Anil Abhimanyu Sharma, diplômé en psycho-sociologie à l’Université de Mumbai, professeur de yoga ancestral (plus de 50 ans de pratique), chef de cuisine indienne en Europe, spécialiste des épices depuis 30 ans, intervenant dans l’école de gastronomie Française Ferrandi Paris depuis 20 ans, coach d’un meilleur ouvrier de France en cuisine, étoilé Michelin 2020. – Paris et Mérignac (33) - Tél. : 0622575371


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Sylvie Palin-Luc

Hypnothérapeute

spécialisée en prévention, accompagnement et rémission du cancer du sein et gestion du stress

0677124206

Consultations à Bordeaux et en visio


IMPORTANT : Les thérapies complémentaires (hypnose, PNL, DNR et les soins énergétiques)

 ne se substituent pas à une démarche thérapeutique traditionnelle, elles ne visent pas à faire un diagnostic ou à prévenir une pathologie. Elles sont compatibles avec tout traitement médical en cours ou à venir. Elles ne peuvent et ne doivent en aucun cas se substituer à un traitement médical qui dans tous les cas doit être poursuivi. En cas de doute demandez l’avis de votre médecin.


[1] Le Panchakarma, du sanskrit pancha (cinq) et karma (action), est un processus de purification et de réjuvénation en cinq étapes pratiqué dans l'Ayurvéda.

[2] Ashram est le nom donné aux cliniques ayurvédiques


[1] Source : « Prakriti : votre constitution ayurvédique », Docteur Robert E. Svoboda, 2005 Ed. Turiya pour l’édition française, 342 p.

[2] Prâna : souffle, énergie vitale

[3] L’aphrodisiaque, en ayurvéda, réduit le flux sanguin pour rester dans un état de transe le plus longtemps possible et prolonger un état de bien-être. Il n’est pas forcément sexuel. La sexualité en Occident est focalisée sur les organes sexuels. En Inde, la sexualité est sensorielle.

[4] Le Docteur Robert E. Svoboda est médecin américain. Il est sorti premier de sa promotion de la Tilak Mahavidyalaya Ayurvedic University de Pune en Inde en 1980. C’est l’un des plus importants experts occidentaux en Ayurvéda.

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